La circoncision laisse sur le corps une inscription, une archive d'un événement absolument dissymétrique. Comme un coup de couteau, une parole venue de l'extérieur s'adresse au nouveau-né. Comme Jakob Freud l'écrit à son fils Sigmund dans la dédicace en hébreu où il rappelle cet événement : "Va, lis dans mon Livre, celui que j'ai écrit". L'infans est invité à lire cette adresse, il ne peut que souscrire à cette alliance qui lui est imposée. Avant même de savoir signer, il est supposé l'avoir contresignée. Une fois, une seule fois, à l'instant où il reçoit un nom, sous ou à même la peau (neuve) blessée et bénie, s'inscrit une marque à laquelle il ne peut qu'acquiescer - et qu'il devra déchiffrer.

Le père de Sigmund Freud, Jakob, rappelle cette injonction à son fils le jour de ses 35 ans. Il lui fait cadeau (ou plus exactement lui restitue, après l'avoir reliée - nouvelle peau) la bible dans laquelle il avait étudié avant l'âge de 7 ans. Selon Yerushalmi, en rappelant et en répétant la circoncision, il invite son fils à reprendre la lecture du Livre : ce à quoi le vieux Freud, près de 50 ans plus tard, finira par obéir en écrivant son Moïse.

Par cette violence à la fois communautaire et très commune (p68), l'infans est invité à entrer dans la communauté - ce qui arrive chaque fois qu'en nous adressant à quelqu'un, nous présupposons (c'est-à-dire imposons) un "nous".